Tag Archives for " stress post-traumatique "

Honte et abus sexuels

J'ai décrit dans ma vidéo précédente les différences entre la honte et la culpabilité, même si on les retrouve souvent réunies.

Quand on se sent honteux, on se regarde à travers les yeux d'un autre qui nous juge, qui nous critique.

Mais cet autre qui nous rejette, c'est nous-mêmes !
C'est pour ça qu'on peut très bien se sentir honteux tout seul. On n'a pas forcément besoin des autres pour rougir de honte !

C'est quoi la honte ?

Les personnes qui souffrent d'une honte chronique croient qu'elles sont fondamentalement défectueuses, mauvaises, dégoûtantes, ou même diaboliques.

Elles condamnent ce qu'elles font ou ne font pas.
Elles condamnent leur apparence physique, qu'elles se jugent laides, trop grosses, ou disproportionnées.
Elles condamnent ce qu'elles ressentent, que ce soit de la colère, de la tristesse, de l'excitation sexuelle ou de la peur.

Bref, elles condamnent qui elles sont, dans leur totalité.

La honte c'est donc un sentiment d'infériorité, d'inadéquation, d'incompétence et d'impuissance. C'est ce qu'on éprouve quand on se sent abandonné, rejeté ou critiqué, que ce soit vrai ou que ce soit simplement une impression.

Et la honte provoque le silence, le repli sur soi, l'envie de disparaitre jusqu'à mourir de honte.

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C’est quoi la dissociation ?

Vous vous intéressez aux traumatismes psychologiques, et vous avez déjà entendu ou lu le mot dissociation.
Mais, en fait, c’est quoi la dissociation ?
Je vais faire mon possible pour vous éclairer !

Le mot dissociation a plusieurs sens.
Il désigne plusieurs concepts qui sont très différents, ce qui entraine évidemment un peu de confusion.

Plusieurs significations pour un même mot

Quand vous vous laissez aller dans un état hypnotique léger, dans une rêverie, ou quand vous avez de la fièvre ou que vous êtes sous l’emprise d’une drogue, on parle de dissociation.

Quand le psychotique délire ou se comporte d’une manière bizarre, on parle de dissociation.

Quand une personne souffre d’un stress aigu, d’un stress post-traumatique, d’une amnésie dissociative ou d’un trouble dissociatif de l’identité, on parle aussi de dissociation.

Je vais surtout vous parler de la dissociation traumatique, celle qui peut survenir lorsqu’on est confronté à un événement traumatisant.
Et cette dissociation est très particulière : elle entraine une fragmentation de la personnalité.

L'intégration

Pour mieux comprendre la dissociation traumatique, c’est plus facile de partir de son opposé, c’est-à-dire l'intégration.

L'intégration, c'est l'association harmonieuse des différentes fonctions de notre personnalité.
Habituellement, vous êtes capables de vous adapter à des environnements très différents. Pour y arriver, votre personnalité doit être non seulement stable et prévisible, mais également flexible. Et pour réussir cette prouesse, vous avez besoin de plusieurs capacités, qu’on peut appeler des processus ou des fonctions : vos perceptions et vos sensations, votre mémoire, vos émotions, vos pensées, le sens de votre identité, le contrôle des mouvements de votre corps ou de votre comportement.

Grâce à toutes ces fonctions, vous agissez de manière cohérente et coordonnée, adaptée à la situation que vous vivez, et en ayant conscience que tout au long de la journée, vous restez toujours la même et unique personne. Ça c’est l’intégration. Toutes les fonctions de votre personnalité travaillent de manière harmonieuse.

La dissociation

Mais quand survient une interruption temporaire des fonctions qui vous permettent de percevoir le monde autour de vous, de vous rappeler votre passé ou de posséder une seule identité qui relie votre passé à votre avenir, alors on parle de dissociation.

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Automutilation : sept bonnes raisons de se faire du mal

Vous avez probablement entendu parler de ces jeunes qui se scarifient ou se lacèrent les poignets, les avant-bras, les cuisses, le ventre, parfois le cou ou les organes génitaux, qui s'infligent des brulures avec des allumettes ou des cigarettes, ou qui se donnent des coups. On parle d'automutilation.

La majorité de ces jeunes sont des filles, adolescentes ou jeunes adultes. La proportion de garçons est beaucoup plus faible.

Parmi toutes les personnes qui s'automutilent, beaucoup ont été victimes d'agressions sexuelles dans leur enfance. Et certaines souffrent d'un trouble de la personnalité qu'on appelle "état-limite", ou borderline en anglais.

Définition

L'automutilation est un comportement répétitif et qui provoque des blessures modérées.

Il faut le distinguer de trois situations dans lesquelles les personnes peuvent se faire du mal :

  • D'abord des tentatives de suicide
  • Puis des automutilations très graves, comme le fait de s'arracher un œil ou de se castrer, qu'on retrouve chez des personnes psychotiques
  • Et enfin des comportements auto-agressifs qu'on peut voir chez certaines personnes atteintes d'un retard mental ou chez certains autistes.

Avant, pendant et après

Souvent, un événement déclenche le besoin de s'automutiler : une dispute, une rupture, une perte, un sentiment d'abandon.
La personne devient très tendue. Elle peut se sentir angoissée, en colère, triste ou effrayée.
Souvent, un état dissociatif s'installe en réaction à ces émotions envahissantes et incontrôlables.

Alors, la personne s'isole et s'automutile.
Beaucoup disent ne pas ressentir de douleur à ce moment-là.
Certains se sentent coupables ou dégoutés d'eux-mêmes après leur acte, mais la plupart se sentent mieux, apaisés, calmes, satisfaits. La tension, la colère, ou la dissociation ont disparu.

On interprète souvent les comportements d'automutilation comme des comportements autodestructeurs. Ce qui voudrait dire que ces personnes essayent de se détruire.

Et bien dans la plupart des cas, c'est tout simplement faux. Ce n'est pas la bonne explication. Elles se font du mal car se faire du mal les aide à survivre.

C'est paradoxal, non ? Essayons d'y voir plus clair.

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Deuil, pandémie et confinement

pandémie et deuil

Je vais parler dans cette vidéo d'un sujet difficile mais ô combien actuel : la mort et le deuil d'un proche en période de pandémie et de confinement.

Vous savez peut-être que les obsèques ne peuvent plus se dérouler normalement, que les décès soient liés au coronavirus ou à d'autres causes.

​Car des décisions drastiques ont été prises par les autorités.

Si la personne est morte du coronavirus, on place son corps très vite dans une housse sanitaire, doublée d'une seconde housse avant de l'installer dans un cercueil qu'on ferme le plus rapidement possible.

Il est donc impossible de faire la toilette du mort ni de pratiquer le moindre soin de conservation.

La conséquence terrible pour les proches, c'est qu'ils ne peuvent ni voir le corps ni se recueillir devant lui.

Les obsèques sont quasi-inexistantes

Aucun proche ne peut toucher ni bénir le cercueil. Personne n'est autorisé à monter dans le corbillard pour accompagner le corps.

Quelle que soit la cause du décès, aucune cérémonie sociale habituelle, religieuse ou laïque, ne peut avoir lieu. Vingt personnes seulement peuvent rentrer dans l'église. Et ce chiffre comprend le personnel des services funéraires.

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Pourquoi une agression sexuelle subie dans l’enfance devient-elle traumatique ?

Stress post-traumatique chez les victimes d'abus sexuels

Nous savons tous que les personnes victimes d'agression sexuelle subie dans l'enfance ont plus de risques de souffrir plus tard dans leur vie de nombreux troubles si on les compare avec des enfants qui n’ont pas subi d’agressions.

Ces troubles peuvent être aussi bien physiques que psychologiques. La liste serait trop longue pour les énumérer ici.

Mais parmi les souffrances psychologiques, on retrouve très souvent des manifestations qu’on regroupe dans ce qu'on appelle le syndrome de stress post-traumatique.

Ce qui signifie que l'agression sexuelle a représenté un traumatisme pour l'enfant.

Bien sûr, quand l’agression sexuelle s’accompagne de violence physique, de peur, de menaces, de douleurs, on comprend qu’elle agisse comme un traumatisme pouvant produire un syndrome de stress post-traumatique.

Mais les agressions sexuelles subies dans l’enfance se font assez souvent sans violence, sans peur, sans menace, sans douleur.

Alors, pourquoi les victimes développent-elles quand-même un stress post-traumatique ?

C'est cette question que je vais aborder un peu avec vous aujourd'hui, en m'appuyant sur un travail de David Finkelhor.

Ce psychologue américain renommé dans le domaine de la victimisation infantile, a développé en 1985 un modèle qui reste à mon avis tout à fait intéressant.

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Mémoire traumatique et “parties dissociatives” : Une animation pour comprendre

mémoire traumatique et parties dissociatives

Photo by pawel szvmanski on Unsplash

Un modèle séduisant pour comprendre les conséquences de la réactivation d'une mémoire traumatique.

Le syndrome de stress post-traumatique

Il a sans doute toujours existé mais il n’a commencé à être décrit qu’à la fin du 19e siècle.

Son installation signale qu’un événement traumatique s’est inscrit d’une manière anormale dans notre mémoire. Au lieu d’être mémorisé sous la forme d’un souvenir autobiographique, que l’on peut raconter au moment où on le décide, qu’on peut même transformer pour l’embellir par exemple, il est mémorisé dans une mémoire traumatique et se retrouve isolé des autres souvenirs. Il est dissocié de la mémoire autobiographique.

Les divers constituants de cet événement sont stockés séparément : images, sons, sensations corporelles, pensées, émotions…Ils ne sont pas intégrés en un souvenir fluide et malléable qui viendrait prendre sa place dans le flux des événements de notre vie. Et ce souvenir traumatique, non intégré, fixé (c’est-à-dire inchangé) et dissocié de notre mémoire habituelle, se répète à travers des cauchemars et des flashbacks. Nous subissons alors l’irruption soudaine, de nuit comme de jour, de certaines composantes de cette mémoire traumatique : des images, des voix, des sensations, des émotions surgissent et nous envahissent, nous laissant impuissants face à ce vécu traumatique que nous vivons comme s’il se produisait réellement.

A cela s’ajoute une hyperréactivité (des sursauts par exemple) et des comportements d’évitement des situations qui rappellent le traumatisme.

On voit clairement comment la souffrance vécue lors du traumatisme se répète et se rejoue, sans modification, et parfois pendant de nombreuses années. L’événement n’est pas intégré.

Des "parties dissociatives" de la personnalité

Ces parties peuvent être schématisées comme des réseaux de neurones ayant acquis des caractéristiques parfois très évoluées.

Elles peuvent contenir des souvenirs traumatiques ou seulement certains de leurs composants (images, sons, sensations corporelles, pensées...). 
Dans les situations de trouble dissociatif de l'identité, lorsque la personne a été victime de traumatismes graves et répétés, ces réseaux se manifestent par de véritables traits identitaires différents de ceux de la personne "hôte" (prénom, sexe, vécu, compétences...).

Ces personnalités dissociatives peuvent ainsi avoir des réactions, des sentiments, des pensées, des sensations corporelles et des perceptions très différents.
Toutes ces parties traumatiques sont appelées des "parties émotionnelles".

La partie qui gère le quotidien, qui s'occupe des enfants, qui travaille et qui joue s'appelle "partie apparemment normale de la personnalité". Lorsque la personne souffre d'un trouble dissociatif de l'identité, plusieurs parties s'associent, se relaient pour gérer le quotidien au mieux de leurs compétences respectives.

Ces descriptions sont celles que nous livre la théorie structurelle de la dissociation, particulièrement bien expliquée dans le livre de Onno Van der Hart, Allert Nijenhuis et Kathy Stelle "Le soi hanté", et dans celui de Suzette Boon, Kathy Stelle et Onno Van des Hart "Gérer la dissociation d'origine traumatique". Ce dernier livre est particulièrement destiné aux patients pour travailler avec leurs thérapeutes.

Un modèle pour mieux comprendre et donner des pistes de guérison

Le modèle présenté dans cette vidéo, est tiré du livre d’une psychologue américaine, Janina Fisher, spécialisée dans les troubles dissociatifs et travaillant en collaboration avec des spécialistes tels que Onno Van der Hart.
Cette animation cherche à expliquer d’une manière simple comment cette mémoire traumatique peut nous submerger et déclencher des réactions de protection parfois dangereuses.
Une option thérapeutique intéressante en découle qui redonne à la personne victime la possibilité d’apaiser sa souffrance post-traumatique.

Il suffit de cliquer sur les images qui suivent, ce qui vous permettra de voir immédiatement les deux parties de cette animation.

J’espère qu'elle vous aidera à retrouver confiance dans vos capacités d’auto-guérison !

Et si vous souhaitez obtenir la bande dessinée au format pdf de cette vidéo, il suffit de cliquer ICI et de suivre les instructions.

N’hésitez pas à laisser vos commentaires.

Bibliographie
Healing the fragmented selves of trauma survivors -Overcoming Internal Self-Alienation - Janina Fisher, Editions Routledge

Dépasser la dissociation d'origine traumatique : Soi fragmenté et aliénation interne - Janina Fisher (traduction de Julien Baillet) - Deboeck Superieur

Le soi hanté - Dissociation structurelle et traitement de la traumatisation chronique ; Onno Van des Hart, Ellert Nijenhuis, Kathy Stelle, Editions de boeck

Gérer la dissociation d'origine traumatique - Exercices pratiques pour patients et thérapeutes ; Suzette Boon, Kathy Steele, Onno Van des Hart, Editions de boeck

Cette animation (version complète qui réunit les deux animations suivantes) décrit ce qui se passe quand une mémoire traumatique de l'enfance est réactivée et que l'adulte que vous êtes devenu(e) se sent envahi(e) par la peur, l'angoisse, la tristesse, le dégoût, la culpabilité. .. Elle montre les processus qui permettent alors d'éteindre la souffrance, avec des conséquences parfois dommageables, et explique le chemin de la guérison.

Comprendre pourquoi vous continuez à souffrir d'un passé traumatique - Première partie

Comprendre pourquoi vous continuez à souffrir d'un passé traumatique - Seconde partie

Vous aurez ici la totalité de l'animation mais sans musique et avec des voix lisant le texte.

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