Aidez vos enfants à ne pas être dans le déni de leurs émotions ni de la mort
Bonjour,
Les pertes et les deuils surgissent dans toutes les vies. La vôtre, comme celles de vos enfants.
Certaines pertes sont nécessaires, c’est-à-dire que chaque être humain doit y faire face : la naissance, le sevrage maternel, la mort des proches.
D'autres pertes sont liées aux circonstances de la vie : un divorce, un licenciement, une maladie, un handicap, pour n'en citer que quelques-unes.
Lorsque nous vivons une perte, que ce soit le décès d'un proche ou une perte liée aux circonstances, nous devons y faire face et nous y adapter.
Mais pourquoi certaines personnes s'adaptent-elles mieux que d'autres ?
Pourquoi certains vont traverser ces épreuves de manière sereine alors que d'autres tomberont dans des états dépressifs sévères ?
Nous avons des défenses contre la souffrance
Face à une perte, nous utilisons des défenses psychologiques, qui sont souvent inconscientes, et des moyens d'adaptation qui sont habituellement conscients et volontaires (on utilise aussi le mot anglais coping, de "to cope" qui veut dire faire face).
Parmi tous les moyens qui permettent de nous protéger face à une douleur trop importante, le déni est la première ligne de défense.
Quand nous sommes confrontés à une perte, le déni est une défense normale. Quelle que soit la perte. Il nous permet de moins souffrir en nous coupant de certaines de nos émotions. Il amortit le choc. Pour nous laisser le temps d'intégrer la perte que nous subissons.
C'est ce qui se passe lors du décès d'une personne que nous aimons. Une partie de notre esprit ne peut accepter la réalité, c’est-à-dire la mort de celui ou celle que nous aimons.
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Le déni nous protège. Il nous aide à ne pas être submergé par des émotions effrayantes et trop douloureuses. Puis progressivement, il disparait pour laisser la place à toutes les émotions du deuil.
Trop de déni nuit !
Mais parfois, le déni persiste, et le travail de deuil n'évolue pas de manière saine. Le deuil est bloqué, retardé, ou il devient chronique.
Les psychologues se sont aperçus que le déni chez l'adulte était lié à des influences qui remontent à l'enfance. L'enfant utilise des moyens de protection qui sont immatures, et c'est normal. Le déni en fait partie.
Mais si l'enfant est confronté à de nombreux problèmes psychologiques, ou à des influences perturbantes, il aura tendance à utiliser les mêmes moyens de protection. Le déni deviendra alors un moyen de protection privilégié à l'âge adulte. Ce qui risque de poser de gros problèmes.
Pour empêcher que le déni ne devienne un moyen de défense trop présent chez vos enfants, que devez-vous faire et ne pas faire, leur dire et ne pas leur dire lorsque votre famille est confrontée à un deuil ?
Car les messages que vous transmettez à vos enfants dans ces situations vont influencer leur propre capacité à faire face aux pertes lorsqu'ils seront devenus adultes.
Vous allez découvrir comment aider vos enfants en ne faisant pas ce que la majorité des adultes font. Car les adultes transmettent aux enfants le déni de leurs émotions et le déni la mort dans de nombreuses situations quotidiennes.
Déni des pertes des enfants
Qu'est-ce qu'il y a de commun entre toutes ces situations : séparation ou divorce des parents, adoption, placement en famille d'accueil, déménagement, changement d'école, échec scolaire, problème de santé, handicap, agression sexuelle et bien sûr mort d'un parent ?
Et bien très souvent, les adultes ne considèrent pas que ces situations sont des pertes pour l'enfant. Et ils ne tiennent donc pas compte de sa souffrance. Ils la nient.
Non seulement l'enfant souffre de ne pas être reconnu dans ses pertes et ses deuils, mais les conséquences de ces dénis dans sa vie d'adulte seront importantes. On sait par exemple que perdre un parent avant l'âge de 11 ans augmente le risque de souffrir plus tard d'une dépression.
Déni de la mort
Une forme de déni très répandue, c'est lorsqu'on dit à un enfant : "Mamy est partie pour un long voyage", ou quelque chose du même genre. Ce type de mensonge montre à quel point on n'est pas à l'aise pour parler de la mort, surtout à un enfant.
Attention aux mots que vous employez
Apprenez à prononcer le mot "mort" quand vous parlez à vos enfants. Ce n'est pas un gros mot. C'est le mot le plus approprié et le plus simple pour décrire cette réalité.
Et attention à ce que vous dites à un enfant âgé de deux à cinq ans ! Car c'est à cet âge qu'il risque d'être le plus perturbé par des phrases du genre : "il s'est endormi pour toujours", ou "il ne se réveillera plus". Il ne faudra pas vous étonner s'il ne veut plus aller se coucher !
Quand vous parlez de la mort à vos enfants, bannissez de votre vocabulaire les mots "parti, perdu, endormi, sommeil, long voyage". Les enfants réfléchissent de manière très concrète et comprennent les mots au premier degré. Tous ces mots trompeurs risquent de les perturber.
Faut-il montrer le corps mort aux enfants ?
Il y a une autre manière de laisser le déni s'installer. C'est de refuser, sous prétexte de le protéger, qu'un enfant puisse voir le corps de la personne décédée.
Sous le même prétexte de protection, on ne propose pas non plus à l'enfant d'assister aux obsèques. Pas de cérémonie religieuse ni laïque, pas de cimetière ni de crématorium, donc pas de mort !
L'enfant doit alors rester à la maison, exclu du reste de la famille. Comme s'il n'était pas en deuil lui aussi !
En fait, il faut proposer à l'enfant de voir le corps, et de poser toutes les questions qu'il souhaite poser, même si elles vous paraissent farfelues ou bizarres.
Bien entendu, cette proposition ne doit se faire que si le corps n'est pas mutilé et avec toutes les précautions et les explications nécessaires.
Et il faut aussi lui proposer d'assister aux obsèques. Mais il est indispensable là encore de lui fournir toutes les explications utiles, de le rassurer, et de le laisser décider ce qu'il préfère.
L'enfant n'a pas besoin de protection, mais d'information.
La mort est irréversible et définitive. Voir et toucher le corps permet à l'enfant de comprendre cette réalité et de l'assimiler.
Déni des émotions de l'enfant
Peut-être qu'en essayant de protéger l'enfant contre les émotions de la mort, nous nous protégeons nous-mêmes.
Et pour ne pas revivre les propres pertes de notre enfance, nous faisons tout ce qu'il faut pour empêcher l'enfant de pleurer.
En le calmant, en le distrayant et en l'éloignant de tout ce qui concerne la mort.
Pour ne pas revivre nos sentiments douloureux, nous dénions sa propre douleur et ses propres émotions.
Malheureusement, en essayant de protéger les enfants de la souffrance, nous les privons d'un apprentissage utile. Nous les empêchons de développer leurs propres moyens d'affronter la douleur et de surmonter les conséquences de leur perte.
En fait, vous devez encourager vos enfants à pleurer, à ressentir et à parler des émotions provoquées par le décès de leurs animaux familiers, par exemple.
Et lors d'un deuil, vous devez accepter de leur montrer votre peine et vos pleurs.
En tant que parent, vous leur offrez un modèle de comment il est possible, autorisé, souhaitable de se comporter dans une telle circonstance.
Ils se sentiront encouragés à partager leurs émotions, que ce soit en pleurant, en parlant, en jouant ou en dessinant.
C'est comme ça que vous les aiderez à apprendre à faire face aux pertes qu'ils vivront tout au long de leur enfance, et plus tard à l'âge adulte.
Et à ne pas être dans le déni de leurs émotions.
Pour conclure
Je sais que certaines des idées que j'ai présentées ici vont en choquer quelques-uns.
Comment, emmener un enfant voir un cadavre et même le toucher ?
Emmener un enfant dans un cimetière et l'exposer à toute la souffrance des adultes ?
Ça va le traumatiser !
Et bien pas du tout. Au contraire. Vous aiderez votre enfant à commencer son deuil. Car lui aussi est en deuil.
Et en l'intégrant à tous ces rituels, vous éviterez qu'il pense qu'il est puni, exclu, parce qu'il est coupable de cette mort !
Et gardez à l'esprit que vous devez dire la vérité aux enfants. Même s'il s'agit d'un suicide.
En leur donnant des explications adaptées à leur âge, mais assez claires et réelles pour qu'ils n'imaginent pas des scénarios pires que la réalité.
Mentir aux enfants, c'est trahir leur confiance. Car ils apprendront la vérité un jour ou l'autre.
Voilà. J'espère que cette vidéo vous aidera à mieux comprendre en quoi c'est important de parler de la mort aux enfants.
Et que vous vous en souviendrez lorsque vous serez confrontés à un deuil.
A bientôt pour une autre vidéo.
Bonjour Docteur, mes enfants ont dû faire face à la mort deux années de suites, dans des circonstances très difficiles et dramatique. Quand je vous est écouté hier, cela ma rassuré de comment je me suis prise pour les accompagner. Je leur ai mis aucune barrière. J’estimais à cette époque là que les enfants avaient un regard moins effrayant sur la mort.Même si la peine est encore présente, mes enfants en parle librement avec de beaux souvenirs. Merci.
Merci pour votre témoignage qui confirme que les enfants, s’ils sont bien accompagnés, ne sont pas traumatisés de participer à tous les rituels liés au deuil.